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La rémunération des agents publics en décharge d'activité de service pour exercer une activité syndicale

Auteur :
Maître Bénédicte Rousseau
|
Publié le
9/12/2023
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Désormais codifié à l’article L. 113-1 du Code général de la fonction publique, l’engagement syndical constitue l’un des droits fondamentaux reconnus aux agents publics :

« Le droit syndical est garanti aux agents publics, qui peuvent librement créer des organisations syndicales, y adhérer et y exercer des mandats.

Le droit syndical s'exerce dans les conditions fixées au titre Ier du livre II. »

L’article L212-1 du CGFP précise, par ailleurs, que :

« Sous réserve des nécessités du service, l'agent public est réputé conserver sa position statutaire ou les stipulations de son contrat lorsque :

1° En qualité de fonctionnaire, il bénéficie, en position d'activité ou de détachement, d'une décharge d'activité de services à titre syndical ;

2° En qualité d'agent contractuel, il bénéficie d'une décharge d'activité de services à titre syndical ;

3° En qualité de fonctionnaire ou d'agent contractuel, il est mis à la disposition d'une organisation syndicale ».

L’agent placé en décharge d’activité de service continue donc de bénéficier des droits et intérêts liés à sa position.

En d’autres termes, même s’il n’assure pas un service effectif, la fiction juridique est justifiée par les exigences des principes fondamentaux de liberté syndicale et d’interdiction des discriminations.

En effet, l’égalité de traitement des agents doit être préservée, sous peine d’entrer dans la qualification de la discrimination syndicale, telle que définie par l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations :

« Constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son origine, de son sexe, de sa situation de famille, de sa grossesse, de son apparence physique, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son patronyme, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, de son état de santé, de sa perte d'autonomie, de son handicap, de ses caractéristiques génétiques, de ses mœurs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée, une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable.

Constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d'entraîner, pour l'un des motifs mentionnés au premier alinéa, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés.

La discrimination inclut :

1° Tout agissement lié à l'un des motifs mentionnés au premier alinéa et tout agissement à connotation sexuelle, subis par une personne et ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ;

2° Le fait d'enjoindre à quiconque d'adopter un comportement prohibé par l'article 2. »

Ainsi, toute personne exerçant un mandat syndical ne saurait être traitée moins favorablement « qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable. »

La mesure relative au maintien du traitement et des primes bénéficie non seulement aux fonctionnaires, mais également aux agents contractuels déchargés de services ou mis à disposition pour l'exercice d'activité syndicale.

Par principe, donc, l’agent public bénéficiant d’une décharge d’activité de service(DAS) ou mis à disposition d’une organisation syndicale, bénéficie du maintien de sa rémunération.

Il n’en demeure pas moins que sa situation connaît des spécificités du point de vue du versement des primes et indemnités.

La jurisprudence administrative a consacré de manière constante le droit au maintien de la rémunération sur le fondement des dispositions statutaires générales (CE, Section, 27 juillet 2012, n° 344801, publié et CE, 4 juin 2019, n°426404, Rec. T.: pour la fonction publique de l’État ; CAA de Lyon, 13 juillet 2022, n° 19LY01373 : pour une application dans la FPT).

Cela ne signifie pas, pour autant, que la totalité des sommes perçues lorsque l’agent était en service lui seront versées lorsqu’il sera placé en décharge d’activité syndicale.

À titre d’illustration, le Tribunal administratif d’Orléans, dans le cadre de l’examen d’une prime instituée postérieurement à la décharge d’activité de l’agent et fondée exclusivement sur l’appréciation de la valeur professionnelle de l’agent, avait retenu qu’en l’absence d’évaluation du fait de sa décharge, l’agent conservait son droit à bénéficier de cette prime, dont le montant devait se calculer en fonction de la moyenne du montant de la prime accordée aux autres agents (TA Orléans, 11 juin 2013, n° 1202469).

De son côté, la Cour administrative d’appel de Nantes avait cependant refusé le bénéfice de l’IAT (indemnité d’administration et de technicité) à un agent bénéficiant d’une décharge totale d’activité, dès lors qu’avant cette décharge, l’agent était en congé de longue maladie. Dès lors que, dans sa position antérieure à sa décharge, elle ne bénéficiait pas de cette prime, le principe du maintien de sa rémunération implique qu’elle demeure dans la situation antérieure à sa décharge, sans IAT (CAA de Nantes, 18 juin 2018,n° 16NT03033).

Le décret n° 2017-1419 du 28 septembre 2017relatif aux garanties accordées aux agents publics exerçant une activité syndicale est venu préciser les conditions de rémunération de certains fonctionnaires bénéficiant d’une décharge d’activité syndicale ou d’une mise à disposition, et plus précisément les conditions du maintien des primes et indemnités perçues avant leur engagement dans l’activité syndicale via une DAS ou une mise à disposition.

Pour les autres agents publics, à savoir ceux ne rentrant pas dans le champ d’application de ce décret, ce sont les règles posées antérieurement qui subsistent.

Le principe du maintien du traitement indiciaire et de la rémunération de base des contractuels étant acquis, c’est au régime indemnitaire des agents publics bénéficiant de décharge de service ou de mise à disposition d’organisations syndicales qu’il convient de prêter une attention particulière.

Plusieurs situations doivent être distinguées :

•   La rémunération des fonctionnaires bénéficiant d’une DAS pour l’exercice d’une activité syndicale, selon que ces agents titulaires bénéficient d’une DAS ou d’une mise à disposition d’une organisation syndicale sur une quotité de travail équivalent à un temps plein, comprise entre 70 et 99 % d’un temps plein ou bien inférieure à 70 % d’un temps plein.

•   La rémunération des agents contractuels bénéficiant d’une DAS pour l’exercice d’une activité syndicale, indépendamment de sa quotité par rapport à un temps plein.

I.  Le régime des primes et indemnités des FONCTIONNAIRES bénéficiant d’une DAS ou mis à disposition d’une organisation syndicale

En application du décret n° 2017-1419 du 28 septembre 2017 relatif aux garanties accordées aux agents publics exerçant une activité syndicale, les modalités de calcul des différentes primes et indemnités varient en fonction de la quotité de temps de travail consacrée à une activité syndicale : 100 %, entre 70 et 99% et moins de 70% d’un service à temps plein.

I.1- La situation des agents titulaires bénéficiaires d’une DAS ou d’une mise à disposition d’une OS sur une quotité de travail équivalent à 100% d’un temps plein 

Jusqu’à l’entrée en vigueur du décret n° 2017-1419 du 28 septembre 2017 relatif aux garanties accordées aux agents publics exerçant une activité syndicale, il était jugé que « le fonctionnaire […] qui bénéficie d'une décharge totale de service pour l'exercice d'un mandat syndical a droit, durant l'exercice de ce mandat, que lui soit maintenu le bénéfice du traitement ainsi que l'équivalent des montants et droits de l'ensemble des primes et indemnités légalement attachés à l'emploi qu'il occupait avant d'en être déchargé pour exercer son mandat, à l'exception des indemnités représentatives de frais et des indemnités destinées à compenser des charges et contraintes particulières, tenant notamment à l'horaire, à la durée du travail ou au lieu d'exercice des fonctions, auxquelles le fonctionnaire n'est plus exposé du fait de la décharge de service »

(v. CAA de PARIS, 18 octobre 2018,n°16PA03510)

Désormais, en ce qui concerne le régime indemnitaire des fonctionnaires en décharge totale d’activité de service, ce décret prévoit :

·  Le maintien du montant annuel des primes et indemnités attachées aux fonctions exercées dans son corps ou cadre d’emploi d’origine, par attribution du montant moyen accordé aux agents du même corps ou cadre d’emploi et relevant de la même autorité de gestion (art. 7 al. 1 et 2)

·   Dans l’hypothèse de la perte d’un logement de fonctions, l’octroi de l’indemnité compensatrice de logement (art. 7 al. 3)

·   La perte des indemnités liées aux frais professionnels, dès lors qu’aucun frais n’est engagé par l’agent (art. 7 al. 4 1°)

·   Le maintien des indemnités versées en cas de dépassement effectif du cycle de travail ou liées à des horaires atypiques si elles sont versées, pour la première à l’ensemble des agents du corps ou du cadre d’emploi, pour la seconde à la majorité des agents de la même spécialité ou, à défaut, du même corps ou cadre d’emploi (art. 7 al. 4 2° et 3°).

Exemple d’application récente relative au versement de l’indemnité relative au travail du dimanche et des jours fériés dans la fonction publique hospitalière :

« 4. Si, étant déchargée de son activité, Mme A n’est plus exposée aux contraintes liées à l’exercice de ses fonctions, il résulte toutefois des dispositions du décret du28 septembre 2017 citées au point 3 que, depuis leur entrée en vigueur, l’agent bénéficiant d’une décharge syndicale a droit au versement du montant des primes et indemnités liées à des horaires de travail atypiques et attachées à l’emploi qu’il occupait avant d’en être déchargé lorsque celles-ci sont versées à la majorité des agents du corps ou cadre d’emplois dont il relève. L’EHPAD défendeur ne conteste pas que Mme Apercevait l’indemnité en litige avant sa décharge d’activité et ne conteste pas sérieusement que les agents des services hospitaliers qualifiés qu’il emploie bénéficient de la prime en litige. Dès lors, Mme A est fondée à soutenir que le refus qui lui a été opposé est, s’agissant de la période postérieure au 1er octobre 2017, entaché d’illégalité. »

(TA Nancy, 6 avril 2023, n° 2100335 ; TA Nancy, 6 avril 2023, n°2103704 ; TA Nancy, 6 avril 2023, n°2100488).

·  La cessation de versement des indemnités liées au lieu d’exercice des fonctions s’il y a changement de résidence (art. 7 al. 4 4°)

·  Les primes et indemnités soumises à l’avis d’une instance et attribuées pour une période déterminée ne sont pas maintenues à l’issue de cette période d’attribution (art. 7 al. 6)

·  Le principe d’égalité de traitement dicte que toute évolution d’une prime doit se faire de manière égale, soit par la progression en fonction d’un indice pour tous les agents, soit au regard de l’évolution moyenne des montants servis aux agents du même corps ou du même cadre d’emploi exerçant auprès de la même autorité de gestion à temps plein et sur un emploi comparable à celui qu’occupait l’agent en décharge d’activité (art. 8 al. 2 et 3).

L’attribution d’une nouvelle prime ou indemnité se fait selon le même calcul que les primes et indemnités déjà instaurées et toute prime ou indemnité supprimée l’est également pour l’agent en décharge d’activité (art. 8 al. 3).

Le Tribunal administratif de Nîmes en a fait une application très récemment à propos du versement de la prime « grand âge » :

« 4. Il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée a été prise au motif que la prime "Grand âge" avait été instaurée postérieurement à la décharge syndicale à plein temps accordée à M. A et que ce dernier, ne percevant pas cette prime avant la mise en place de cette décharge d'activité, ne pouvait dès lors en bénéficier. Toutefois, il résulte des dispositions du décret du 28 septembre 2017 citées au point 3 que, sous les conditions qu'elles prévoient, l'agent bénéficiant d'une décharge syndicale d'activité est susceptible de bénéficier de la prime "Grand âge" attachée à l'emploi qu'il occupait avant d'en être déchargé, alors même que cette prime a été instituée à une date postérieure à l'octroi de cette décharge. Par suite, M. A est fondé à soutenir que la décision du 25 janvier 2021 est entachée d'une erreur de droit et doit être annulée. »

TA Nîmes, 23 mai 2023, n° 2100918

Voir également, s’agissant du versement de l’indemnité forfaitaire de risque à certains agents de la fonction publique hospitalière :

« 2.En vertu des dispositions de l’article 1er du décret du 2 janvier 1992 susvisé, portant attribution d’une indemnité forfaitaire de risque à certains agents de la fonction publique hospitalière, modifié par le décret du 28 juin 2019 entré en vigueur au 1erjuillet 2019, une indemnité forfaitaire de risque est attribuée aux agents affectés en permanence, et depuis le 14 décembre 2019, aux agents réalisant au moins la moitié de leur temps de travail dans les structures de médecine d’urgence mentionnées au 2° et au 3° de l’article R. 6123-1 du code de la santé publique. Aux termes de l’article 2 de ce décret : « L’indemnité forfaitaire de risque est payée mensuellement, à terme échu. Elle est réduite dans les mêmes proportions que le traitement ». Aux termes de l’article 7 du décret du 28 septembre 2017, relatif aux garanties accordées aux agents publics exerçant une activité syndicale : « L’agent bénéficiant d’une décharge totale ou d’une mise à disposition conserve le montant annuel des primes et indemnités attachées aux fonctions exercées dans son corps ou cadre d’emplois avant d’en être déchargé./ (…) ». Aux termes de l’article 8 de ce décret : « (…) / Si une évolution du régime indemnitaire intervient au bénéfice de l’ensemble du corps ou du cadre d’emplois, à une date postérieure à celle de l’octroi de la décharge syndicale ou de la mise à disposition, le montant de la nouvelle prime ou de la nouvelle indemnité versé est calculé sur la base du montant moyen attribué aux agents occupant à temps plein un emploi comparable à celui que l’agent occupait précédemment. (…) ».

3. D’une part, il ressort des pièces du dossier et il n’est pas contesté que M. B, avant d’être déchargé totalement d’activité de service pour exercer des activités syndicales au 1er janvier 2008, était affecté en permanence dans l’une des structures de médecine d’urgence mentionnées au 2° et au 3° de l’article R. 6123-1 du code de la santé publique. D’autre part, il ressort des dispositions précitées du décret du 2 janvier 1992, portant attribution d’une indemnité forfaitaire de risque à certains agents de la fonction publique hospitalière, que cette indemnité, pour être versée forfaitairement et dans les mêmes proportions que le traitement à l’ensemble des agents affectés en permanence, puis réalisant au moins la moitié de leur temps de travail dans les structures de médecine d’urgence mentionnées au2° et au 3° de l’article R. 6123-1 du code de la santé publique, constitue une indemnité attachée aux fonctions exercées dans le corps auquel appartient M. B. Par suite, en refusant d’accorder à M. B, par la décision attaquée, le bénéfice de l’indemnité forfaitaire de risque, le directeur général du centre hospitalier universitaire de Lille a méconnu les dispositions précitées des articles 1er et 2 du décret du 2 janvier 1992 et de l’article 8 du décret du28 septembre 2017, relatif aux garanties accordées aux agents publics exerçant une activité syndicale. M. B est dès lors fondé à demander l’annulation de cette décision »

TA Lille, 5 octobre 2023, n° 2100758.

Et v. pour une application à la FPT : TA Pau,25 avril 2023, n° 2001898et à la FPE : TA Nîmes, 25 octobre 2022, n° 2003486 (versement de l’ indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise - IFSE).

· Lorsqu’une prime présente un caractère exceptionnel, le droit de l’agent en décharge d’activité à la percevoir dépend des critères d’attribution de cette prime.

Sur ce point, le Tribunal administratif de Nancy a récemment rejeté la demande d’un agent en décharge totale d’activité sollicitant le versement de la prime « covid », aux motifs que :

« Par délibération du 1erjuillet 2020 le conseil départemental a approuvé la mise en place d'une prime exceptionnelle en application du décret du 14 mai 2020. Cette < prime> est déconnectée du régime indemnitaire classique et est octroyée aux agents du département selon deux critères alternatifs relatifs à un surcroit significatif d'activité ou à une présence particulière face aux usagers et aux fournisseurs pendant la période du 17 mars au 10 mai 2020.

10. Il résulte des dispositions précitées du décret du 14 mai 2020 et de la délibération du 1er juillet2020 que M. C n'est pas fondé à soutenir que cette prime, qui vise les agents particulièrement mobilisés pendant l'état d'urgence sanitaire, sans être liée au grade ni aux fonctions exercées, correspondrait à un versement exceptionnel modulé au titre de l'engagement professionnel ou de la manière de servir au sens du 2ème alinéa de l'article 7 du décret du 28 septembre 2017 précité. Le requérant n'est donc pas fondé à revendiquer le versement à ce titre du montant moyen attribué aux agents du même corps ou cadre d'emplois. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C aurait connu un surcroit significatif de travail pendant cette période. Il suit de là que c'est sans commettre d'erreur de droit ni d'erreur d'appréciation que l'administration a refusé de lui attribuer la " prime covid". » (TA Nancy, 28 mars 2023, n° 2100557).

· L’avancement de grade est pris en compte dans la détermination du montant des indemnités de l’agent, « selon les modalités applicables aux agents détenant le grade dont il devient titulaire » (art. 9).

·  L’article 13 du décret de 2017 prévoit le maintien de la NBI dans l’hypothèse où l’agent a exercé pendant au moins 6 mois les fonctions y donnant droit avant décharge syndicale.

NB : le maintien de la NBI a connu plusieurs évolutions : tout d’abord le refus du Conseil d’État de la verser aux agents en DAS totale (CE, 27 juillet 2005, n° 255395) puis un revirement de jurisprudence (CE, 27 juin 2016, n° 391825, T.). La condition des 6 mois d’exercice effectif imposée par le décret de 2007 semble tempérer cette jurisprudence.

·     Au-delà des éléments de rémunération, on peut relever également, en application de l’article 14 de ce même décret, que :

« L'agent qui bénéficie d'une décharge totale de service pour l'exercice d'un mandat syndical bénéficie de l'accès aux dispositifs de prestations d'action sociale et de protection sociale complémentaire institués, en application des articles 9 et 22 bis de la loi du 13 juillet 1983 précitée, par l'employeur qui a accordé la décharge d'activité ou la mise à disposition. »

I.2-    La situation des agents titulaires bénéficiaires d’une DAS ou d’une mise à disposition d’une OS sur une quotité de travail comprise entre 70 et 99 % d’un temps plein

Le décret précité n° 2017-1419 du 28 septembre 2017 a également prévu quel était le régime indemnitaire des fonctionnaires qui consacrent à une activité syndicale une quotité de temps au moins égale à 70 % mais inférieure à 100 % d’un service à temps plein.

· L’article 12 dudit décret prévoit que :

« L'agent qui consacre une quotité de temps de travail au moins égale à 70 % et inférieure à100 % d'un service à temps plein à une activité syndicale a droit au versement de l'ensemble des primes et indemnités attachées à son grade ou aux fonctions qu'il continue d'exercer.

Le taux appliqué à ces primes et indemnités est celui correspondant à l'exercice effectif de fonctions à temps plein. »

Ainsi, l’agent qui continue à exercer ses fonctions, même minoritairement en comparaison au temps consacré à son activité syndicale, continue à percevoir ses primes et indemnités comme s’il exerçait ses fonctions à temps plein(v. pour une application à la FPE : TA Paris, 26 octobre 2022, n° 2124207).

·  L’agent bénéficie également du maintien de sa NBI à condition d’avoir exercé pendant une durée d'au moins six mois des fonctions donnant lieu au versement d'une nouvelle bonification indiciaire ou d'une bonification indiciaire (art. 13 du décret de 2017).

Naturellement, si l’agent change de poste en cours de décharge, il ne conserve pas le droit à percevoir la NBI liée à son poste précédent (TA Amiens, 18 avril 2023, n° 2104069).

I.3 -  Les fonctionnaires exerçant une activité syndicale ou d’une mise à disposition d’une OS sur une quotité de temps de travail inférieure à 70 % d’un temps plein

Le régime indemnitaire des fonctionnaires exerçant une activité syndicale sur une quotité de temps de travail inférieure à 70 % d’un temps plein n’est régi par aucun texte réglementaire spécifique.

Notamment, l’article 1er du décret de 2017 indique implicitement que ces agents sont exclus de son champ d’application en prévoyant que seul « le fonctionnaire qui, bénéficiant d'une mise à disposition ou d'une décharge d'activité de service, consacre une quotité de temps de travail égale ou supérieure à 70 % d'un service à temps plein à une activité syndicale est soumis aux dispositions du présent décret ».

Or, selon l’adage « Ubi lex non distinguit nec nos distinguere debemus »,il est interdit de distinguer là où la loi ne distingue pas.

Par suite, sous réserve de confirmation du juge, il convient de continuer de leur appliquer la jurisprudence du Conseil d’État précédent l’entrée en vigueur du décret de 2017, laquelle continue, en toute logique juridique, de prévaloir dans les situations qui n’ont pas été distinguées par ledit décret.

Pour rappel, un fonctionnaire qui bénéficie d’une décharge de service pour exercer un mandat syndical a par principe, le droit de conserver sa position statutaire.

Le Conseil d’État a, par ailleurs, établi le droit au maintien du bénéfice de l’ensemble des primes et indemnités attachées à l’emploi occupé avant la décharge, à l'exception :

> des indemnités représentatives de frais ;

> des indemnités compensant les charges et contraintes particulières, liées notamment à l'horaire, à la durée du travail ou au lieu d'exercice des fonctions, auxquelles le fonctionnaire n'est plus exposé en raison de la décharge.

(CE, Section, 27 juillet 2012, n° 344801, publié)

Sous ces deux réserves, le droit au maintien concerne aussi les primes et indemnités liées à l'exercice effectif des fonctions.

En effet, comme énoncé précédemment, l’égalité de traitement des agents doit être préservée, sous peine d’entrer dans la qualification de la discrimination syndicale, telle que définie par l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Dès lors que l’agent doit être regardé comme étant suffisamment présent dans son emploi pour faire l’objet d’une évaluation professionnelle, il doit pouvoir prétendre au maintien de l’ensemble de ses primes et indemnités, sans prise en compte de son activité syndicale, sous peine d’être victime de discrimination syndicale.

En ce sens, il a été jugé, notamment, qu’un agent titulaire en décharge partielle d’activité avait droit au versement de l’intégralité de sa prime de service et de rendement :

« Le fonctionnaire territorial auquel est attribuée une décharge partielle de service a droit, durant l'exercice de son mandat, au versement, sur la base d'un temps plein, des primes de service et de rendement qui lui sont attribuées au titre des fonctions qu'il continue d'exercer et ce, au taux effectivement constaté; que, dès lors, le tribunal administratif de Bordeaux ne pouvait, sans commettre d'erreur de droit, estimer qu'eu égard à l'absence de service effectif pendant la décharge de service partiel dont M. A bénéficiait en sa qualité de secrétaire général d'Interco CFDT, l'intéressé n'était pas fondé à demander l'annulation de la décision attaquée du 11 mars 2003 par laquelle le directeur général de l'office public d'aménagement et de construction Habitalys a refusé à M. A de lui rétablir le bénéfice de la prime de rendement et de service dans son intégralité ; qu'il suit de là, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, que le jugement du tribunal administratif de Bordeaux doit être annulé »

(CE, 7 juillet 2008 n°295039, mentionné aux Tables)

II.   Le régime des primes et indemnités des agents CONTRACTUELS bénéficiant d’une DAS pour l’exercice d’une activité syndicale

Les agents contractuels sont également exclus du champ d’application des dispositions du décret du 28 septembre 2017 relatives à la rémunération des agents publics bénéficiant d’une décharge d’activité ou de mise à disposition auprès d’une organisation syndicale (v. art. 1er).

Ce sont donc les dispositions de droit commun qui s’appliquent à eux, au même titre que pour les fonctionnaires dont les activités syndicales sont inférieures à 70% d’un temps plein.

L’article L713-1 du CGFP dispose que « la rémunération des agents contractuels est fixée par l'autorité compétente en tenant compte des fonctions exercées, de la qualification requise pour leur exercice et de l'expérience de ces agents. / Elle peut tenir compte de leurs résultats professionnels et des résultats collectifs du service et évoluer au sein de l'administration, de la collectivité ou de l'établissement qui les emploie ».

En application des textes réglementaires applicables à chaque fonction publique, « le contrat détermine les conditions d'emploi de l'agent et notamment le montant de sa rémunération, en précisant chacun de ses éléments constitutifs, sa périodicité ainsi que ses modalités de versement. […] » (article 4 al 3 du décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de la fonction publique hospitalière ; v. également : article 4 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'État et l’article 3 du décret n°88-145 du 15 février 1988 relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale).

Pour rappel, l’article L212-1 du CGFP précise quant à lui que :

« Sous réserve des nécessités du service, l'agent public est réputé conserver sa position statutaire ou les stipulations de son contrat lorsque :

[…]

2° Enqualité d'agent contractuel, il bénéficie d'une décharge d'activité de servicesà titre syndical ;

3° Enqualité de fonctionnaire ou d'agent contractuel, il est mis à la dispositiond'une organisation syndicale ».

Aucune disposition réglementaire ne semble préciser davantage le régime indemnitaire des agents contractuels en décharge d’activité de service pour l’exercice d’une activité syndicale.

Le texte législatif est cependant très clair : l’agent public contractuel (ou non-titulaire) qui bénéficie d’une DAS ou est mis à disposition d’une organisation syndicale, conserve également le bénéfice des stipulations de son contrat de recrutement (et des éventuels avenants).

Au-delà du droit au maintien de sa rémunération, l’agent contractuel placé en décharge d’activité de service pour raisons syndicales, même à 100% d’un temps plein, est en droit de solliciter la revalorisation de sa rémunération dans le cadre du réexamen trisannuel de sa situation (TA Melun, 3 octobre 2013, n° 1102171). Si l’administration employeur peut refuser cette revalorisation, cela ne saurait être au motif que l’agent bénéficie d’une décharge totale d’activité pour raisons syndicales.

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